Schneider Electric Étude de Cas Marketing Digitale

Schneider Electric est un leader mondial de la gestion de l’énergie et des automatismes, présent dans plus de 100 pays avec près de 137 000 employés. Face à la montée en puissance du digital, y compris dans l’industrie, l’entreprise a fait du numérique le cœur de sa stratégie commerciale (marketing, ventes, service client, e-commerce) depuis plusieurs années. Le secteur industriel et de l’énergie doit en effet relever le défi de la transformation digitale, alors même que de nombreuses entreprises peinent encore à « maîtriser les bases » en matière d’expérience client numérique. Les clients professionnels attendent désormais des interactions aussi fluides et personnalisées que dans le B2C, avec des contenus adaptés en temps réel à leurs besoins. La crise du COVID-19 a d’ailleurs accéléré ces mutations : la disparition des salons et rendez-vous physiques a forcé les équipes commerciales B2B à combler le vide par des tactiques digitales, ce qui a accéléré la transformation de nombreuses organisations. Découvrez comment Schneider Electric a relevé ces défis dans cette étude de cas détaillée sur sa stratégie digitale depuis 2020, s’inscrivant dans la lignée des autres études de cas de transformations digitales réussies.
Problématique / Contexte
Défis initiaux. Avant 2020, Schneider Electric faisait face à plusieurs défis structurels freinant sa performance commerciale. D’une part, ses outils de gestion de la relation client étaient dispersés : chaque région ou unité utilisait parfois ses propres solutions, rendant la vue d’ensemble client morcelée. Les processus de vente étaient longs et complexes, avec un cycle de vente étalé sur de nombreux mois, typique du B2B industriel. La collaboration marketing-ventes était perfectible, en grande partie à cause de ces silos de données et d’un manque d’alignement global sur les outils. En parallèle, l’entreprise dépendait historiquement de méthodes traditionnelles (salons, rendez-vous terrain) pour générer des leads, ce qui la rendait vulnérable lorsque ces canaux furent perturbés par la pandémie. Enfin, Schneider évolue dans un marché très compétitif : de grands concurrents de l’industrie électrique et automatisme (tels que Siemens, ABB, etc.) investissent eux aussi massivement dans le numérique. Pour garder son leadership, Schneider Electric devait accélérer sa digitalisation commerciale.
Exigences du marché. Les attentes des clients industriels ont profondément évolué. Désormais, un directeur d’usine, un gestionnaire immobilier ou un ingénieur attendent une expérience en ligne personnalisée, du contenu pertinent et des réponses instantanées, comme ils en ont l’habitude en tant que consommateurs. Par exemple, un responsable de maintenance cherchera des outils de maintenance prédictive, tandis qu’un directeur financier exigera des tableaux de bord d’efficacité énergétique sur mesure. Fournir ce niveau de personnalisation était un défi pour Schneider, d’autant que la qualité des données initiales et l’harmonisation des plateformes laissaient à désirer. Comme beaucoup d’industriels, Schneider a dû s’assurer que ses initiatives digitales soient bien alignées avec ses objectifs business pour délivrer de la valeur, et non de simples gadgets technologiques. En somme, au tournant de 2020 l’entreprise a identifié la nécessité de transformer en profondeur sa stratégie digitale afin de réduire les cycles de vente, augmenter les conversions et fidéliser sa clientèle B2B exigeante.
Mise en place de la stratégie digitale
La réponse de Schneider Electric a consisté en une transformation digitale globale touchant ses outils, ses contenus et ses processus marketing/ventes. Depuis 2020, l’entreprise déploie un plan structuré autour de trois piliers : un CRM unifié, des contenus personnalisés, et l’automatisation marketing.
Adoption du CRM unifié
Schneider Electric a d’abord unifié sa gestion client en déployant un CRM global commun à toutes ses entités. Dans le cadre de l’initiative “One Schneider”, l’entreprise a remplacé de multiples systèmes disparates par une solution unique basée sur la plateforme Salesforce Customer 360. Concrètement, les forces de vente et les équipes service client du monde entier utilisent désormais Sales Cloud et Service Cloud intégrés, ce qui fournit une vue client à 360° et homogène à l’échelle globale. Les objectifs de cette refonte CRM étaient clairs : centraliser les données clients pour briser les silos, mieux suivre les opportunités commerciales et améliorer la coordination entre marketing, vente et support. Schneider Electric souhaitait également standardiser les bonnes pratiques de suivi commercial et de relation client dans ses 100+ pays, tout en offrant la flexibilité nécessaire aux équipes locales.
Par ailleurs, l’entreprise a enrichi son CRM de fonctionnalités avancées d’intelligence artificielle afin d’optimiser le pipeline de vente. En partenariat avec Salesforce, Schneider a intégré des outils d’AI/ML (tels que Tableau CRM Analytics et Einstein Discovery) qui exploitent des données variées (historique d’achats, commandes, données d’équipements IoT installés chez le client, etc.) pour identifier les meilleures opportunités commerciales. Ce “digital opportunity factory” analyse en continu le parc client afin de détecter par exemple qu’un équipement arrive en fin de vie ou qu’un client pourrait bénéficier d’une mise à niveau. Le système attribue alors automatiquement ces leads à l’équipe commerciale appropriée et fournit des recommandations d’action, avec un score prédictif indiquant la probabilité de conversion de chaque opportunité. Ainsi, grâce à ce CRM unifié et intelligent, les commerciaux peuvent concentrer leurs efforts sur les prospects les plus prometteurs, au bon moment. Cette approche data-driven répond à l’un des objectifs majeurs de Schneider : accélérer le cycle de vente et augmenter le taux de réussite des affaires.
Contenus digitaux personnalisés
Le deuxième pilier de la stratégie a été la personnalisation des contenus et de l’expérience en ligne pour les clients et partenaires. Schneider Electric a investi dans la création de plateformes et contenus digitaux sur mesure, adaptés aux besoins spécifiques de chaque audience. L’illustration la plus marquante est le lancement en 2021 de mySchneider, un portail client et partenaire tout-en-un, offrant une expérience personnalisée sur le site web de Schneider. Dès sa mise en place, plus d’un million de clients et partenaires se sont connectés pour profiter de ce nouvel espace numérique personnalisé. Le portail mySchneider fournit une authentification unique (SSO) et agrège en un seul lieu tous les services et outils digitaux dont un utilisateur a besoin, avec une interface personnalisable.
Concrètement, chaque utilisateur voit un tableau de bord adapté à son profil : un distributeur ou intégrateur aura un accès direct aux informations produits, aux devis, commandes et programmes de partenariat, tandis qu’un gestionnaire de site visualisera ses actifs installés, contrats de maintenance et indicateurs de performance de ses équipements. Chaque profil peut choisir d’afficher ou masquer certains modules, organiser l’agencement de sa page d’accueil, et recevoir des notifications ciblées (nouveaux produits, mises à jour logicielles, webinaires, livres blancs techniques, etc.) en fonction de ses préférences. Cette personnalisation fine de l’expérience utilisateur – rendue possible par la consolidation des services numériques en une plateforme unique – vise à simplifier le quotidien des clients et partenaires de Schneider en leur faisant gagner du temps et en leur fournissant une information pertinente en continu. « Il est notre priorité d’offrir une expérience en ligne efficace 24/7 pour répondre aux exigences de nos clients » souligne Peter Weckesser, Chief Digital Officer, ajoutant que mySchneider est un élément central de la transformation digitale centrée sur les besoins du client.
En parallèle du portail, Schneider Electric a adopté une démarche de marketing de contenu personnalisé. Les campagnes digitales (emails, newsletters, réseaux sociaux, webinars) sont désormais largement segmentées et personnalisées selon les profils : secteur d’activité, taille de l’entreprise, fonction du décideur, phase du cycle d’achat, etc. Par exemple, un lead entrant recevra un welcome email introductif, tandis qu’un prospect ayant manifesté de l’intérêt pour une solution spécifique sera nourri avec du contenu technique approfondi (études, témoignages clients) pertinent pour ce domaine. L’entreprise mise sur la « hyper-personnalisation » de son marketing B2B, s’inspirant des meilleures pratiques B2C où l’IA et l’analyse de données en temps réel permettent de présenter des produits ou contenus très ciblés. Cette approche vise à accroître l’engagement et le taux de conversion : en effet, les études montrent que la personnalisation des messages peut augmenter les conversions de 10 % en moyenne, et que l’automatisation des emails marketing via un CRM peut les booster de 53 %. Schneider Electric a donc aligné son contenu sur les attentes précises de chaque segment de clientèle, s’assurant de délivrer le bon message, au bon moment, sur le bon canal.
Automatisation marketing
Enfin, le troisième levier de la stratégie digitale de Schneider Electric est l’automatisation des processus marketing, aussi appelée marketing automation. L’entreprise utilisait déjà la plateforme Marketo depuis 2015 comme outil d’automatisation marketing (gestion des leads, campagnes emails, scoring, etc.), mais rencontrait des difficultés à en exploiter tout le potentiel à l’échelle mondiale. En 2017, après un déploiement initial, Schneider a constaté une adoption hétérogène de l’outil dans les différents pays, des problèmes de coordination entre les nombreuses agences marketing locales, et un manque de visibilité globale sur la performance des campagnes. Les programmes conçus par le siège étaient parfois sous-utilisés par les filiales, le reporting n’était pas uniformisé et des erreurs persistaient dans les campagnes, faute de processus harmonisés. Pour une entreprise aussi vaste, il devenait crucial d’industrialiser la production de campagnes marketing et de mieux intégrer ces efforts avec les ventes.
À partir de 2020, Schneider Electric a donc refondu son organisation d’automatisation marketing avec l’aide de partenaires spécialisés. Un modèle de gouvernance global a été mis en place, incluant la constitution d’une équipe internationale dédiée (regroupant plus de 30 spécialistes sur 5 continents) pour gérer et optimiser les campagnes Marketo. Des processus standardisés, une documentation commune et des formations renforcées ont été déployés afin d’améliorer l’adoption locale et de réduire les erreur. Ce hub centralisé permet de lancer des campagnes multiplateformes 24h/24 (« follow the sun ») tout en offrant un support en région pour adapter le contenu si besoin.
Sur le plan opérationnel, Schneider Electric a conçu une véritable usine à leads numérique. Grâce à Marketo et aux données du CRM, l’entreprise a défini des segmentation fines de sa base de données afin de déclencher des programmes automatiques tout au long du cycle d’achat du client. Par exemple, un lead nouvellement entré reçoit automatiquement une séquence d’accueil (welcome program), un prospect en phase d’évaluation entre dans un programme de nurturing éducatif, un contact associé à une opportunité en cours intègre un programme d’accélération de pipeline, etc. De même, les clients existants bénéficient de programmes de fidélisation (nouveaux usages, mises à jour, cross-sell) et les anciens contacts inactifs peuvent être relancés via un programme de réactivation. L’intérêt de ces workflows automatisés est qu’ils fonctionnent en continu (« always-on ») : une fois conçus, ils s’exécutent en tâche de fond et chaque contact est automatiquement orienté vers le bon programme en fonction de critères prédéfinis (segment, score, actions effectuées). Cela assure une couverture optimale de la base de prospects sans effort manuel constant, tout en maintenant la personnalisation du message en fonction de la maturité du lead. Schneider Electric a même élaboré un “blueprint” visuel de ces parcours clients pour orchestrer le passage d’un programme à l’autre, ce qui a aidé les équipes locales à embrasser cette stratégie always-on et à comprendre comment chaque prospect progresse dans le tunnel de conversion.
Les résultats attendus de cette automatisation marketing étaient multiples : augmenter le volume de leads qualifiés traités sans mobiliser plus de ressources humaines, améliorer la réactivité (par exemple en répondant instantanément aux nouvelles demandes via des enchaînements d’emails automatisés), et surtout augmenter le taux de transformation des leads en clients. Selon Gartner, les entreprises qui automatisent le suivi de leurs leads constatent une augmentation de leurs ventes de plus de 10 % en moins de six mois. Schneider Electric visait donc un ROI rapide de ces programmes automatisés. De plus, en intégrant étroitement l’outil marketing avec le CRM Salesforce, l’entreprise cherchait à aligner encore davantage le marketing et les ventes : par exemple, le scoring des leads (note d’un lead basée sur son comportement) est utilisé pour alerter les commerciaux en temps réel quand un prospect devient chaud. Cette démarche a favorisé une vision commune du parcours client entre les deux équipes, éliminant le traditionnel fossé marketing/ventes. Enfin, en outillant ses collaborateurs, Schneider voulait leur permettre de se concentrer sur des tâches à valeur ajoutée (contenu, créativité, relationnel) pendant que les tâches répétitives (envois d’emails, segmentation, relances) seraient gérées par le système automatisé.
Résultats et bénéfices

La mise en œuvre de cette stratégie digitale ambitieuse a porté ses fruits, avec des améliorations nettes sur les performances commerciales de Schneider Electric entre 2020 et 2023.
Cycle de vente raccourci. Premier indicateur tangible : le délai de conclusion des ventes s’est sensiblement réduit. En concentrant les forces de vente sur les opportunités à plus forte probabilité de conversion (grâce aux scores prédictifs de l’IA) et en engageant plus efficacement les prospects via le nurturing automatisé, Schneider Electric a pu accélérer son cycle de vente de 30 % environ. En d’autres termes, le temps moyen pour transformer une opportunité en commande ferme a baissé d’un tiers. Si, par exemple, il fallait auparavant 6 mois en moyenne pour conclure une affaire complexe, ce délai pourrait désormais n’être que de 4 mois environ. Cette réduction remarquable – bien supérieure à la baisse de 8-14 % généralement observée avec un CRM – témoigne de l’efficacité de l’approche data-driven. Les commerciaux disposent en début de cycle d’informations clients plus complètes et pertinentes, ce qui leur permet d’adopter rapidement la meilleure approche. De plus, les programmes d’accélération de pipeline (envois automatiques de contenus pertinents aux prospects déjà en discussion avancée) ont contribué à garder ces prospects engagés et à réduire les phases d’hésitation. Le résultat est une conclusion plus rapide des deals, générant un chiffre d’affaires plus immédiat et améliorant la productivité de l’équipe commerciale.
Hausse du taux de conversion. Schneider Electric a également constaté une augmentation significative de ses taux de conversion tout au long du funnel de vente. D’une part, le pourcentage de leads marketing qui sont convertis en opportunités commerciales a grimpé grâce au nurturing personnalisé : en diffusant le bon message au bon segment, l’entreprise a réduit la déperdition de leads. Un indicateur révélateur est qu’en l’espace de quatre mois après le déploiement des programmes always-on, la proportion de la base de données recevant des communications en continu est montée d’environ +60 %. Autrement dit, beaucoup moins de contacts « dormants » sont laissés sans suivi, ce qui augmente mécaniquement les chances de conversion future. D’autre part, le taux de conversion opportunité client s’est amélioré grâce au ciblage des meilleures opportunités (via l’IA). Les commerciaux, libérés des nombreuses petites opportunités peu qualifiées, se concentrent sur les prospects prioritaires et concluent davantage d’affaires.
Les résultats commerciaux globaux liés aux campagnes digitales et à l’automatisation sont éloquents. Schneider Electric a presque doublé les revenus générés par ses programmes marketing en un an : les ventes remportées attribuées aux campagnes d’automatisation marketing ont connu une croissance de +94 % d’une année sur l’autre. Ce bond spectaculaire souligne l’impact direct qu’a eu la refonte du marketing digital sur le chiffre d’affaires. En d’autres termes, les campagnes automatisées orchestrées via Marketo/Salesforce apportent presque deux fois plus de ventes qu’auparavant, signe d’un ROI excellent pour la transformation digitale. À titre de comparaison, les entreprises utilisant un CRM observent en moyenne +26 % de croissance de leur chiffre d’affaires: Schneider a donc su dépasser ces benchmarks grâce à une exécution efficace.
Amélioration de la relation client. Au-delà des chiffres de vente, Schneider Electric récolte des bénéfices en termes de satisfaction et fidélisation client. La plateforme personnalisée mySchneider a fortement contribué à améliorer l’expérience client globale. Désormais, plus d’un million de clients et partenaires disposent d’un espace unique pour interagir avec Schneider : commander des produits, suivre leurs projets, accéder à du support technique ou à de la documentation, le tout de manière autonome 24h/24. Cette autonomie digitale, couplée à la pertinence du contenu présenté, a accru la satisfaction des utilisateurs. Schneider mesure régulièrement le Net Satisfaction Score (NSS) de son site web, et les initiatives comme la recherche conversationnelle par IA (qui fournit des recommandations produit instantanées) ont conduit à une hausse substantielle de ce NSS. Les clients trouvent plus rapidement l’information ou la solution qu’ils cherchent, ce qui se traduit par une meilleure perception du service en ligne. Par ailleurs, la réactivité globale s’est améliorée : un client qui fait une demande de devis ou de renseignement via le site reçoit immédiatement une confirmation et intègre un flux de suivi automatisé (email de remerciement, ressources utiles en fonction de son besoin, etc.), là où auparavant le suivi pouvait prendre plusieurs jours. Cette fluidité renforce la confiance et l’image d’une entreprise moderne, proche de ses clients.
Enfin, la transformation digitale a eu un impact positif en interne. Les équipes marketing et ventes de Schneider travaillent aujourd’hui de manière beaucoup plus alignée. Grâce au partage d’une plateforme commune et de processus unifiés, le traditionnel fossé entre marketing et commerciaux s’est réduit. Les deux équipes suivent des objectifs communs (le revenu généré, le taux de conversion, etc.) et collaborent sur le parcours client de bout en bout. Le marketing automation a permis de dégager du temps aux marketeurs et aux commerciaux, en éliminant certaines tâches manuelles répétitives : ils peuvent consacrer plus de temps à l’analyse stratégique, à la création de contenu à valeur ajoutée ou à l’échange direct avec les clients stratégiques. Cette montée en compétence digitale des collaborateurs s’est accompagnée d’un vaste programme de formation : plus de 90 % des employés Schneider ont suivi des modules de digital upskilling ces dernières années pour s’approprier les nouveaux outils et méthodes. Cela a été déterminant pour ancrer la transformation dans la durée. In fine, Schneider Electric aborde la suite avec une organisation plus agile, orientée données et client, prête à maintenir son avantage concurrentiel dans un monde de plus en plus numérique.
Analyse critique et enseignements
L’expérience de Schneider Electric offre plusieurs enseignements clés pour mener à bien une transformation digitale d’envergure.
Facteurs de succès. Un premier facteur de réussite a été le soutien fort de la direction et une vision stratégique claire. La nomination d’un Chief Digital Officer (CDO) en 2020 a incarné cette volonté de changement au plus haut niveau. Ce parrainage exécutif a facilité la mobilisation des ressources et la coopération des différentes équipes à travers le monde. Deuxième ingrédient : Schneider a investi autant dans l’humain que dans la technologie. La formation massive des employés aux outils digitaux (programme Digital Citizenship, etc.) a permis d’atténuer les résistances au changement et de développer une culture data-driven partagée. L’entreprise a également misé sur la structuration de ses processus (gouvernance globale, documentation, support local) pour assurer une adoption cohérente. Sans ce travail d’organisation, même la meilleure technologie serait restée sous-exploitée.
En troisième lieu, Schneider Electric a eu l’intelligence de garder le client au centre de sa transformation. Chaque initiative digitale visait explicitement à répondre à un besoin client identifié (simplifier l’accès aux ressources, accélérer le support, proposer des solutions sur mesure…). Ce fil rouge « customer-centric » a orienté les choix techniques et garanti que les investissements digitaux servent les objectifs business. Par exemple, la personnalisation poussée du portail mySchneider répond directement à la diversité des profils utilisateurs – cette adéquation besoin/solution a favorisé l’adoption du portail et donc le ROI associé. De plus, Schneider a su s’entourer de partenaires experts (Salesforce, intégrateurs, agence marketing) pour accélérer sa montée en maturité digitale. S’appuyer sur l’expertise externe s’est avéré payant pour résoudre des défis complexes, comme l’intégration de données issue de systèmes legacy ou l’optimisation de workflows globaux. Enfin, un facteur critique a été la mesure et l’amélioration continue. Schneider a défini des KPIs clairs (cycle de vente, taux de conversion, NSS, etc.) et suivi de près les résultats. Les retours d’expérience ont permis d’itérer : par exemple, après un pilote concluant sur quelques pays, la stratégie a été progressivement étendue globalement, avec des ajustements en cours de route. Cette approche agile a consolidé le succès sur le long terme.
Difficultés rencontrées. Malgré ses succès, Schneider Electric a dû surmonter certains écueils pendant sa transformation digitale. Le changement culturel a sans surprise été l’un des principaux obstacles. Convaincre des équipes locales, historiquement autonomes, de suivre des processus communs et d’adopter un outil mondial n’a pas été aisé initialement. Il a fallu communiquer la vision, montrer les « quick wins » et répéter les formations pour emporter l’adhésion. Schneider a retenu qu’il est crucial de pédagogie et de répétition pour faire évoluer les pratiques établies. Une autre difficulté majeure fut la complexité technique de l’intégration des données. La consolidation de sources multiples (CRM locaux, bases marketing, données IoT) a nécessité un effort important de nettoyage et d’ingénierie. À titre d’exemple, l’agrégation des données d’opportunités dans l’outil d’analytics Salesforce prenait au départ plus de 40 heures et retardait la détection de nouvelles opportunités ; l’entreprise a dû repenser l’architecture des flux de données pour ramener ce délai à 5,5 heures seulement. Cela souligne l’importance d’une gouvernance des données solide et d’une optimisation technique pour supporter les ambitions digitales. Schneider a d’ailleurs appris qu’il ne faut pas traiter son entrepôt de données CRM comme un « data lake » illimité, mais bien épurer et segmenter les flux pour gagner en efficacité.
Par ailleurs, l’entreprise a dû veiller à conserver une cohérence globale tout en laissant assez de flexibilité locale. Trouver ce juste équilibre n’est pas trivial : Schneider a mis en place des “handshakes” formels entre les équipes centrales et chaque pays pour convenir des campagnes à déployer et des objectifs, tout en laissant chaque région adapter le timing ou quelques nuances. Sans ce dialogue, la transformation aurait pu être perçue comme « imposée d’en haut » et perdre en efficacité. Enfin, un écueil aurait été de dissocier la transformation digitale des objectifs business. Schneider a évité ce piège en alignant étroitement son programme digital avec sa stratégie commerciale (croissance des services, offres IoT, etc.). D’autres industriels se focalisent parfois sur la technologie pour la technologie et s’étonnent de ne pas obtenir de gains clairs. L’exemple Schneider montre qu’il faut toujours garder en tête les usages et résultats métiers attendus.
Leçons à tirer. Pour d’autres entreprises industrielles engagées dans le digital, la trajectoire de Schneider Electric offre plusieurs leçons. D’abord, investir dans un socle technologique évolutif (CRM, marketing automation, analytics) est devenu indispensable : il s’agit du nouveau « système nerveux digital » de l’entreprise, qui doit être pensé de manière intégrée plutôt qu’en silos. Ensuite, la personnalisation à grande échelle n’est plus un luxe mais un facteur clé de succès : il convient de tirer parti de l’IA et des données pour offrir une expérience client sur mesure, sans quoi les clients iront vers des concurrents plus à l’écoute de leurs besoins. Schneider illustre qu’on peut apporter la simplicité du B2C dans la complexité du B2B en personnalisant l’approche tout en capitalisant sur son expertise sectorielle. Par ailleurs, la conduite du changement doit être planifiée avec autant de soin que le déploiement technologique : impliquer les utilisateurs tôt, former, expliquer les bénéfices et célébrer les succès intermédiaires aide à embarquer toute l’organisation. Enfin, cette étude de cas souligne l’importance de piloter la transformation par la valeur : Schneider a constamment relié ses initiatives digitales à des métriques business (ventes, efficacité opérationnelle, satisfaction client). Cette discipline permet de garder le cap et de justifier les investissements, tout en donnant la capacité d’ajuster le tir si un projet ne génère pas les gains escomptés.
Conclusion et ouverture
En conclusion, la stratégie digitale de Schneider Electric depuis 2020 a profondément transformé son approche commerciale, avec à la clé des bénéfices tangibles : un cycle de vente plus court, des taux de conversion en hausse, une relation client enrichie et une organisation plus agile et data-driven. En l’espace de quelques années, le groupe est passé d’un modèle traditionnel fragmenté à un écosystème digital unifié où CRM intelligent, contenus personnalisés et marketing automatisé travaillent de concert pour soutenir la croissance. Schneider Electric a ainsi renforcé son positionnement de pionnier, non seulement sur ses marchés industriels, mais aussi dans sa façon d’engager et de servir ses clients.
Cette transformation n’est toutefois pas une fin en soi ; elle s’inscrit dans une démarche d’amélioration continue. À l’avenir, Schneider Electric compte exploiter pleinement les opportunités de l’IA et notamment de l’IA générative (GenAI) pour aller encore plus loin dans la personnalisation et l’efficacité des opérations marketing et vente. Par exemple, on peut imaginer des assistants virtuels plus sophistiqués aidant les clients à configurer des solutions complexes, ou des analyses prédictives toujours plus précises grâce aux données massives recueillies. L’entreprise entend également développer davantage ses services digitaux (logiciels, offres cloud) qui complètent son offre matérielle, ce qui ouvrira de nouvelles voies pour interagir avec les clients de façon continue. Enfin, Schneider pourra partager les leçons de sa transformation avec d’autres acteurs du secteur pour élever les standards de toute l’industrie en matière de digitalisation. En somme, Schneider Electric aborde la prochaine étape de son voyage digital avec ambition : maintenir son avance en innovant, en s’adaptant aux évolutions technologiques et en gardant le client au centre de ses préoccupations.
Pour aller plus loin, n’hésitez pas à consulter d’autres études de cas de stratégies digitales réussies et à vous inspirer des meilleures pratiques pour votre propre transformation.